L'émerveillement des sens

3 mai 2002
Maria Turner
Partager

Sommelière et peintre, Sophie Feredj aime autant goûter un bon vin que toucher à la peinture. Artiste autodidacte, elle a appris le langage de la peinture toujours en suivant l’intuition de ses sens.

Assise dans son loft de la rue de Bordeaux, qui lui sert à la fois d’atelier et de maison, Sophie Feredj a l’apparence d’une artiste. Ce n’est pas uniquement ses vêtements (camisole noire et pantalons rouges qui s’harmonisent bien avec ses lunettes), ni le fait qu’elle soit entourée de toiles qui donnent cette impression — c’est plutôt sa manière de parler. « L’art est un état d’esprit » explique-t-elle. Et Sophie Feredj ne manque pas d’esprit, ni d’énergie pour être artiste.

Partager

Sommelière de profession, cette jeune femme a une approche originale de la vie. Initiée par son père, un amateur collectionneur de vins, elle s’est tournée vers la sommellerie après avoir travaillé dans le département de recouvrement d’une banque. « Je voulais trouver un travail où les gens étaient prédisposés à être heureux » rit-elle, comme si elle trouve l’idée un peu paradoxale. Après dix ans passés dans la restauration (du Bistro Champlain et du Toqué au Restaurant Cube), elle avoue que si sa carrière n’apporte pas toujours le bonheur, le vin lui donne toujours du plaisir : « J’aime vraiment savourer un verre du vin, passer du temps avec le vin. »

Du vin à la peinture
Et comment la sommelière est-elle devenue l’artiste ? Cette transformation est venue naturellement pour Sophie — elle a eu un de ses premiers contacts importants avec l’art dans un restaurant. « Au Bistro Champlain il y avait des Riopelle sur tous les murs. De voir les vraies toiles devant moi m’a beaucoup touché — la peinture était vivante. C’est à ce moment-là que l’art est devenu tangible pour moi. » Peu à peu, l’idée de « goûter » l’art pour sa propre satisfaction s’est formée dans sa tête. Un jour, en 1997, elle est entrée dans un magasin et a acheté des toiles, de la peinture, des pinceaux : un geste qui a changé sa vie.

Retour à l’école
Elle s’est instruite toute seule. Au début, ce fut un apprentissage continu. Néophyte dans le médium, elle a dû apprendre comment manipuler la peinture, comment communiquer ses sentiments par les toiles, les couleurs, et les gestes. Elle décrit cette époque comme celle d’une enfant qui apprend à marcher et à parler : « Il faut apprivoiser une couleur. Il faut que tu l’intègres dans ton esprit, que tu puisses commencer à la voir pour être capable de l’intégrer dans une toile. » Un pas à la fois, elle a construit son propre langage en peinture, un vocabulaire de gestes qui se répètent et qui, comme le parler d’un enfant, évoluent.

Qu’il y ait une qualité presque sculpturale dans ses peintures n’est pas un accident. Très marquée par Giacometti, Sophie utilise la spatule et l’acrylique (l’huile est interdite à cause de son nez sensible de sommelier) pour donner une texture à des figures qui prennent une forme ou une autre dans ses oeuvres. Sans avoir nécessairement une idée fixe de ce qu’elles représentent, elle explore l’espace que ces figures occupent et les liens qui existent entre elles : « Quand j’ai commencé, j’avais l’idée d’une forme qui apparaissait dans un espace vide. Plus tard, c’est devenu presque architectural. Par moments, il y avait des éléments comme des échafaudages qui gravitaient autour de ces formes sculpturales. »

Les leçons de l’enfance
Avec son air sophistiqué et naïf en même temps, il n’est pas difficile de voir la petite fille qui jouait du piano et qui dansait le ballet dans l’artiste d’aujourd’hui. Étonnamment, le grand espoir de son adolescence était le ski alpin auquel elle s’est consacrée pendant cinq ans. Mais son espérance ne s’est pas réalisée. « Ç’a été la grande déception de ma vie », admet-elle. Cette désillusion « brutale » l’a poussée à chercher le plaisir dans la vie quotidienne. Sa quête n’est pas étrangère aux valeurs de sa famille franco-algérienne pour laquelle la bouffe, et tous les plaisirs sensoriels qui l’accompagnent, occupaient une place centrale. « On mangeait des choses simples — j’ai découvert le foie gras plus tard — mais toujours bonnes, raconte Sophie. Toutes mes références olfactives viennent de la maison : le thym, le romarin, etc. ». De ses parents elle a aussi hérité d’une vénération pour la nourriture : « On a toujours partagé chaque fruit entre nous parce que chaque fruit peut être une merveille. Je fais cela encore aujourd’hui avec mes amis. »

Et c’est peut-être cette recherche personnelle et familiale de l’enchantement dans le quotidien qui l’a conduite d’abord au vin puis à la peinture. « J’aimerais retrouver l’émerveillement de nouveau », dit-elle de ses futurs projets artistiques. Mais elle hésite à assumer complètement l’identité d’une artiste : « Ce n’est pas pertinent qu’on me définisse comme artiste, je suis quelqu’un qui peint ». Malgré cette réticence, elle admet que la peinture est plus qu’un passe-temps pour elle. « Je fais des choix dans ma vie en conséquence de cela, choix d’appartement, de mon horaire de travail, etc. La peinture a beaucoup d’importance pour moi. » Craint-elle d’avoir trop d’attentes après la déception de son adolescence ? Elle a déjà exposé ses oeuvres dans des galeries ; cependant, elle confesse manquer de motivation pour se vendre dans le milieu professionnel de l’art. Ce dont elle ne manque pas est le désir de continuer son exploration : « La peinture va sûrement me suivre pour le reste de mes jours. »

Et qu’est-ce que Sophie pense de la Cuvée Rezin qui porte son oeuvre sur son étiquette ? « C’est un bon vin, bien sûr ! » s’exclame-t-elle avec toute l’assurance de la sommelière.

 

Partager

Cette cuvée a été sélectionnée par nos soins dans une cave du sud de la France, selon les critères de qualité et d’intégrité qui nous sont chers. Ce vin est le reflet, à prix modique, de la démarche de plusieurs vignerons que nous représentons depuis 7 ans en importation privée.

Nous vous proposons donc ici notre marque maison, empreinte du plaisir de boire de bons vins naturels à l’abri des préjugés que l’on peut avoir à l’égard des cépages ou des appellations d’origine trop contrôlées.

feredj